Volcanologie : la plaine d'Elysium

Mars Global Surveyor


Les laves d'Elysium

  • Date : 4 avril 1998, après le début de l'orbite n° 219 (11:36 PM PDT).
  • Position : 5,8° N pour 208,9° W.
  • Résolution : 12 mètres/pixel.

Le bassin d'Elysium est une vaste dépression qui s'étend sur plus de 3000 km d'ouest en est, au sud des fameux volcans d'Elysium. L'image A est une vue d'ensemble de la région d'Elysium. On reconnaît deux des principaux volcans (Elysium Mons et Albor Tholus), le bassin d'Elysium, un chenal d'inondation dont nous allons parler (Marte Vallis) et la grande tache sombre nommée Cerberus. Le carré blanc indique la zone survolée par Global Surveyor et l'emplacement des différentes photographies. L'image B montre une vue agrandie de la région ou a été prise la photographie n°21905. L'image obtenue par Global Surveyor apparaît en vignette.

Les images à basse résolution du bassin d'Elysium obtenue par l'orbiter Viking 1 (image B) étaient intrigantes. Les cliches montraient une mosaïque de taches sombres et claires. Une texture similaire avait été observée dans Marte Vallis. Certains y voyaient un phénomène lié au volcanisme, alors que d'autres expliquaient cet aspect en invoquant une érosion éolienne différentielle sur les sédiments du fond asséché d'un ancien lac.

Deux théories différentes ont donc été avancées pour expliquer la formation de ce bassin. L'une voit dans cette dépression le site d'un ancien lac de 1500 mètres de profondeur. L'assèchement du lac serait survenu très récemment, comme semble l'indiquer le faible nombre de petits cratères d'impact qui ponctuent le plancher du bassin. A un moment donné, le lac aurait atteint une profondeur telle qu'il a commencé à déborder. Une grande quantité d'eau s'est alors déversée à l'est pour former Marte Vallis, un chenal d'inondation de plusieurs centaines de kilomètres qui court vers le nord est. Il est clair que le lac, ainsi que Marte Vallis (Marte signifie Mars en espagnol), constituent des sites de prédilection pour un retour d'échantillon et la recherche d'une éventuelle vie martienne.

La deuxième hypothèse est un peu moins excitante. Le fond du bassin d'Elysium aurait été recouvert par des coulées de lave extrêmement fluides, aussi fluides que de l'eau. Pour être aussi liquide, la teneur en silice de la lave devait être très faible, la température très élevée et le débit plutôt important. Il n'est pas exclut que le bassin est d'abord été un lac d'eau dans un lointain passé, mais des éruptions assez récentes l'aurait complètement fait disparaître sous des tonnes de lave en fusion. La lave se serait épanchée à l'extérieur du bassin et aurait été canalisée par le chenal de Marte Vallis.

Les images obtenues par la sonde Mars Global Surveyor ont permis de trancher. C'est la deuxième hypothèse qui est la bonne. Le bassin d'Elysium ne constitue donc pas un excellent site pour la recherche d'une vie martienne.

Les images sont étonnantes. Elles montrent une surface constituée de gigantesques plaques aux contours géométriques imbriquées les unes avec les autres, et qui ont flotté, comme des radeaux, sur de la lave en fusion. Le bassin d'Elysium était en fait un énorme lac de lave, s'étendant sur plusieurs centaines de kilomètres. La lave en surface a commencé à refroidir et s'est craquelé, fragmenté, en formant d'immenses plaques de lave froide de plusieurs kilomètres de long. Certaines plaques se sont détachées et se sont laissées porter par le courant, se déplaçant avec la lave en fusion. Les images rappellent d'ailleurs de manière étonnante la banquise du satellite Europe telle que l'a observé la sonde Galileo.

Nous l'avons déjà dit, il y a très peu de cratères d'impact sur le plancher du bassin d'Elysium. Ainsi, les éruptions qui ont donné naissance au lac puis à sa surface craquelée ont du intervenir très récemment dans l'histoire de Mars. On pense qu'elles sont plus récentes que les plus jeunes volcans martiens, comme ceux de Tharsis (Ascraeus et même Olympus Mons). Cependant, elles ont quand même eu lieu il y a plusieurs centaines de millions d'années. N'oublions pas que Mars est aujourd'hui une planète géologiquement morte, et que nous n'y avons jamais observé d'éruptions volcaniques.

Notez bien que la présence d'un lac de lave au niveau du bassin d'Elysium ne signifie pas que celui ci n'a jamais hébergé auparavant une vaste étendue d'eau. Nous ne savons pas non plus si Marte Vallis a été creusée par de l'eau avant de servir de conduit à des flots de lave en fusion, ou si le chenal a été façonné par la seule action de la lave.

Les laves d'Elysium A

Les laves d'Elysium B
Malin Space Science Systems/NASA


Elysium Mons : vue rapprochée de la caldeira sommitale.

  • Date : 2 juillet 1998, après le début de l'orbite n° 403 (09:58 à 10:05 PM PDT).
  • Position : 24,85° N pour 213,25° W.
  • Résolution : 4,65 kilomètres/pixel pour l'image A et 5,24 mètres/pixel pour l'image D.

Le 4 juillet 1998, date du premier anniversaire de la sonde Mars Pathfinder, des nouvelles images de l'un des volcans majeurs de Mars sont parvenues sur Terre. Situé à 25°N de latitude et 213°W de longitude, Elysium Mons domine la région d'Elysium, la plus haute de Mars, après celle du dôme de Tharsis. Il apparaît au centre de l'image A (caméra basse résolution de Mars Global Surveyor), accompagné par deux autres édifices importants, le volcan Hecates Tholus en haut (dont le flanc nord-est est couvert par un voile de nuages blancs) et Albor Tholus en bas à droite. Ces volcans s'élèvent à 12,5 kilomètres des plaines environnantes et à 16 kilomètres au dessus du niveau zéro. Elysium Mons a été observé pour la première fois par la sonde Mariner 9 en 1972.

L'image B est une vue rapprochée de la caldeira d'Elysium Mons (orbiter Viking). Le rectangle blanc indique la zone photographiée par la caméra haute résolution de Mars Global Surveyor.

Les images C et D ont été obtenues par Global Surveyor. La résolution de l'image C est de 21 mètres/pixel. Le rectangle blanc indique l'emplacement de l'image D, qui montre le détail du mur sud de la caldeira d'Elysium Mons ainsi qu'une partie du fond du cratère.

Elysium Mons diffère sensiblement des volcans de la région de Tharsis. En particulier, on n'a pas trouvé sur les clichés de Mariner 9 de traces évidentes d'écoulement de lave sur ses flancs. Les vue à haute résolution fournies par la caméra de Global Surveyor semblent confirmer ce fait. On peut compter un grand nombre de cratères à la surface d'Elysium. Certains tirent leur origine d'un impact météoritique, mais beaucoup ne montrent pas les figures éjecta caractéristiques des cratères d'impact. Quelques cratères sont par contre disposés sur des lignes situées de manière radiale par rapport à la caldeira sommitale. Ils se sont peut être formés à la suite de l'effondrement de la surface du volcan, sous l'effet du retrait de la lave au niveau du sous sol. On peut aussi invoquer un volcanisme de type explosif, mais ce phénomène a pour l'instant été très difficile à mettre en évidence sur les images renvoyées par les sondes précédentes.

Elysium Mons présente de nombreuses ressemblances avec le volcan Emi Koussi au Chad (Afrique). La caldeira de ces deux volcans est circulaire, et présente des traces attestant d'effondrements successifs. Les murs bordant la caldeira ainsi que la partie supérieure des flancs du volcan sont aussi entaillés par des chenaux profonds. Les deux édifices se sont apparemment fissurés et la lave s'est engouffré dans les fractures. Cependant, on peut noter une différence importante entre le volcan martien et le volcan terrestre. Le ruissellement (du à l'eau de pluie) a formé de nombreux chenaux sur les flancs du volcan Emi Koussi, alors que rien de tel n'est observable sur les flancs d'Elysium Mons.

Elysium Mons A

Elysium Mons (caldera) B Elysium Mons (caldera) C

Elysium Mons, détail de la caldera D
Malin Space Science Systems/NASA

 

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