En 1999, la Planetary Society
décide d'offrir une formidable opportunité à de jeunes étudiants du monde
entier : celle de participer à une véritable mission spatiale en concevant un
instrument scientifique qui partira et fonctionnera sur Mars !
En partenariat avec le Jet Propulsion Laboratory, le centre de la NASA qui
conçoit et dirige les sondes interplanétaires américaines, la Planetary
Society réserve deux emplacements à bord de MECA,
une expérience embarquée sur l'atterrisseur
de la mission Mars Surveyor 2001.
L'expérimentation MECA doit permettre d'appréhender les dangers de la surface
martienne. A l'aide de quatre instruments différents (un microscope, un
laboratoire de chimie, un électromètre et une plaque de tests), elle étudiera
les propriétés du sol et la poussière et identifiera les interactions
possibles de ces substances avec des matériaux que l'homme mettra un jour en
œuvre sur Mars.
La nano-expérience des heureux gagnants du concours prendra place au sein de la
plaque de tests. Cette plaque se propose d'étudier les effets de
l'environnement martien sur différents matériaux qui rentreront dans la
confection des combinaisons spatiales (plastique, plexiglas des visières, nylon
des gants, élastomères pour les joints) ou la fabrication des habitats et des
robots (métaux, filtres, panneaux solaires).
Pour pouvoir participer, seul ou au sein d'un petit groupe, il fallait être
âgé de moins de 18 ans et faire preuve d'une sacré imagination. Car les
contraintes qui pesaient sur l'expérience étaient particulièrement
nombreuses. L'instrument devait tenir dans le volume d'un dès à coudre (un
cylindre de 1 centimètre de diamètre pour 1 centimètre de hauteur) et peser
moins de 3 grammes. Du point de vue énergétique, il devait être entièrement
autonome : pas question de se brancher sur les batteries de l'atterrisseur. Les
étudiants avaient alors le choix entre une expérience passive ne nécessitant
pas d'alimentation électrique ou une expérience active qui ne pouvait compter
que sur son propre panneau solaire. Les résultats devaient être uniquement
recueillis grâce aux observations régulières de la caméra du bras robotique.
Les liquides, les composés biologiques et les matériaux radioactifs étaient
formellement proscrits. L'utilisation de parties mobiles était aussi
déconseillée.
Comme n'importe quelle expérience scientifique, cette nano-expérience devra
aussi montrer patte blanche à de nombreux tests avant de pouvoir s'envoler vers
Mars. Elle devra être qualifiée pour le vol spatial et prouver qu'elle peut
aisément survivre à l'accélération du lancement, à un voyage de plusieurs
mois dans le milieu interplanétaire, au choc de l'atterrissage et aux rudes
conditions de la surface martienne. Les candidats devaient fournir un prototype
de l'instrument ainsi qu'une documentation détaillée de moins de 350 mots.
Enfin, il fallait constituer un journal retraçant le développement de la
nano-expérience.
Parmi les 10 finalistes du concours, deux expériences ont finalement été
retenues. Lucas Moller a conçu un instrument permettant de mesurer l'angle
d'une surface à partir duquel la poussière martienne ne peut plus se déposer.
Deux autres étudiants, Kelly Trowbridge et Jessica Sherman, ont mis au point
une expérience pour étudier l'altération du cuivre dans l'atmosphère
martienne.
Les résultats fournis par ces deux expériences ont été jugés suffisamment
importants par les membres du jury pour le futur de l'exploration martienne. La
poussière, omniprésente à la surface de Mars, constitue un sérieux handicap
pour les astronautes. En connaissant l'inclinaison qui empêche les particules
de poussière de se déposer, les ingénieurs pourront concevoir des panneaux
solaires dont la surface restera naturellement propre. La deuxième expérience
permettra d'étudier la corrosion et l'oxydation dans l'atmosphère martienne
d'un métal qui pourrait être employé lors des prochaines missions habitées.
Les modèles de vols des deux instruments sont actuellement en cours de
construction, tous les coûts associés étant pris en charge par la Planetary
Society. Si les expériences passent avec succès la certification spatiale,
elles seront intégrées à l'expérimentation MECA.
Seul point noir à l'horizon, l'incertitude qui pèse sur l'atterrisseur de la
mission Mars Surveyor 2001. Suite à la perte des deux dernières sondes
martiennes de la NASA, son lancement a effectivement été suspendu. La mission
pourrait partir deux années plus tard, en 2003, mais rien de définitif n'a
encore été annoncé par l'agence spatiale américaine. Le sort de
l'atterrisseur devrait être définitivement fixé aux alentours du mois d'août
2000.
Malgré ce développement malheureux, on ne peut qu'applaudir l'initiative de la
Planetary Society. Le concours Student NanoExperiment va permettre à des
étudiants de se familiariser avec la recherche spatiale et d'acquérir des
notions dans des domaines comme la conception d'un instrument, sa mise en œuvre
ou encore la récupération, le traitement et l'archivage des données reçues.
Sans compter la leçon assénée par les mésaventures de l'atterrisseur 2001.
Si le secteur du spatial est passionnant, il est aussi très difficile et
risqué...
Cet article a été publié
pour la première fois sur le site Geoman.Net.
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