L'atterrisseur déchu de Mars Surveyor 2001

Suite à la perte consécutive des deux sondes de la mission Mars Surveyor 98, la NASA est en train d'effectuer une refonte complète de son programme d'exploration martien. Si l'orbiteur de la mission Mars Surveyor 2001 doit toujours s'envoler vers Mars à la date prévue, il n'en est pas de même pour l'atterrisseur. Celui ci a la malchance d'être une copie carbone de Mars Polar Lander. La cause de l'échec de Mars Polar Lander ne sera jamais connue avec certitude, à cause de l'absence de données télémétriques pendant la phase d'atterrissage. Mais, d'après plusieurs commissions d'enquête de la NASA et du JPL, Mars Polar Lander était criblé de défauts et l'atterrisseur de la mission Mars Surveyor 2001 aurait hérité des vices de son aîné. Par prudence, son lancement a donc été annulé pour le créneau de 2001, alors qu'il était déjà à moitié construit ! L'avenir de l'atterrisseur est sombre et incertain et il sera sans doute démantelé en une réserve de pièces détachées pour les futures sondes. Tout ce qui est rapporté dans cette page l'est donc probablement en vain ...

Objectifs

L'objectif de cette mission concernait l'exploration des hauts plateaux de Mars, en particulier l'étude de la surface d'un point de vue géologique et historique, en relation avec le thème principal du programme Mars Surveyor de la NASA : l'eau. L'atterrisseur de Surveyor 2001 doit également permettre de valider un certain nombre de nouvelles technologies (atterrissage de précision, fabrication de carburant in situ) et de préparer l'exploration de Mars par des humains (étude de l'environnement radiatif, du sol et de la poussière).

La mission

La période de lancement pour l'atterrisseur de la mission Mars Surveyor 2001 devait débuter le 5 avril 2001 et se prolongera pendant 20 jours jusqu'au 24 avril 2001. Le lanceur utilisé sera une fusée Delta II 7425. Pendant le voyage vers Mars, qui durera 9 mois, l'atterrisseur sera protégé par un bouclier. La première manœuvre de correction de trajectoire aura lieu 8 jours après le lancement, et il y en aura quatre en tout. Les communications avec la Terre se feront grâce à l'antenne à faible gain (LGA) ou à gain moyen (MGA) de l'étage de croisière. En tenant compte des contraintes qui pèsent sur le site d'atterrissage, celui ci sera sans doute limité aux régions dont l'altitude est inférieure à 2,5 km au dessus du niveau moyen de référence et dont la latitude est comprise entre 15° S et 15° N (régions équatoriales).

L'arrivée sur Mars aura lieu entre le 16 janvier 2002 et le 5 février 2002. Elle est actuellement prévue pour le 22 janvier 2002. Ce sera alors la fin de l'été dans l'hémisphère sud (Ls = 310). Si l'atterrisseur et l'orbiteur partent tous les deux au début de leur fenêtre de lancement respective, l'atterrisseur atteindra la planète rouge 37 jours après l'orbiteur. Il atterrira en utilisant un parachute (hérité de Pathfinder) ainsi qu'une rétrofusée (fonctionnant avec de l'hydrazine) et un radar de descente. L'atterrissage sera donc beaucoup plus doux que celui de Pathfinder ! La contamination du site d'atterrissage par les rétrofusées est inévitable. Cela ne pose cependant pas de problèmes, car ce type de contamination est bien connu depuis les atterrisseurs Viking.

Pendant sa descente vers la surface martienne, l'atterrisseur devra fournir des images à haute résolution du site d'atterrissage, grâce à une caméra de descente. Celle ci sera d'une aide précieuse pour la caractérisation du site d'un point de vue géologique et pour la planification des opérations et des déplacements de l'astromobile. L'atterrisseur est également sensé démontrer la faisabilité d'un atterrissage de précision (10 km).

La mission commencera avec le déploiement du robot, les tests vitaux et l'établissement d'une communication avec l'orbiteur (qui servira de relais avec la Terre). La charge des batteries commencera aussitôt que possible. La durée de vie de l'atterrisseur devrait être de 100 à 300 jours. L'atterrisseur transmettra ses données à l'orbiteur de Mars Surveyor 2001, qui passera au dessus du site deux fois par jour.

La charge scientifique

La charge scientifique de l'atterrisseur est particulièrement impressionnante : on y trouve le paquet APEX pour les études géologiques, l'expérimentation MECA pour tenter de déterminer les dangers que présente l'environnement martien pour l'homme, l'expérimentation MARIE qui consiste à étudier la nature et le taux des radiations à la surface de Mars, l'expérimentation MIP pour la fabrication de carburant in-situ (cette expérience comporte elle même cinq modules différents, dont deux sont présentés ici en détails : MATE et DART). Il faut ajouter à cette longue liste la présence d'un cadran solaire (le premier à fonctionner sur une autre planète que la Terre) et une expérience entièrement conçue par un étudiant (The Student NanoExperiment Challenge). Enfin, la mission Mars Surveyor 2001 sera l'occasion pour le public de prendre part activement, et ce pour la première fois dans l'histoire de l'exploration spatiale, à une mission spatiale. Des étudiants pourront effectivement participer au contrôle du robot Marie Curie et du bras robotique qui équipe l'atterrisseur, dans le cadre du projet Red Rover Goes to Mars.

APEX

L'atterrisseur emporte un package scientifique (APEX, Athena Precursor Experiment), qui n'est autre qu'une version réduite du package emporté par l'astromobile Athena lors de la mission de retour d'échantillons. APEX va permettre d'obtenir des images stéréo couleur de la surface de Mars et de déterminer la composition minéralogique des sols et des roches, histoire de mener à bien une étude géologique et climatique de la planète. Actuellement, le package se compose de quatre instruments scientifiques. Deux sont fixés sur un mât de 121 cm. A sommet de ce mât se trouve le PanCam et le miroir de renvoi du Mini TES, ce dernier étant monté à la base du mât. Le mât peut tourner sur 360°, et le système PanCam peut également s'incliner vers le haut ou vers le bas. Un autre instrument est accroché au bras robotique de l'atterrisseur (le spectromètre Mössbauer), et le dernier est transporté par l'astromobile marie curie (le spectromètre APXS).

L'expérimentation MECA

L'expérimentation MECA (Mars Environmental Compatability Assessment) a pour objectif de déterminer les dangers que représente la surface martienne pour l'homme. Elle va servir à caractériser la poussière et les sols, identifier les interactions indésirables avec les hommes et les systèmes électroniques et permettre le design des systèmes d'habitations et des combinaisons spatiales pour les sorties extra-véhiculaires (EVA). Il s'agira également de proposer des matériaux pour simuler le sol martien sur Terre.

Voici les principales caractéristiques de la poussière martienne :

  • Adhésion : C'est la caractéristique principale. En adhérant aux combinaisons spatiales, les particules peuvent voyager et finalement se retrouver dans les zones habitables, ou elles deviendront dangereuses. C'est la force électrostatique qui est principalement responsable de l'adhésion, mais les particules peuvent aussi être capturées mécaniquement (en se glissant entre les mailles des tissus par exemple).
  • Abrasion : Les particules soufflées par des vents violents peuvent abraser et décaper différents matériaux, tout comme le sable projeté à grande vitesse sur Terre. Les panneaux solaires pourraient par exemple être attaqués. Des vents soufflants à plus de 85 m/s sont en effet capables de les abîmer. Mais des vents aussi rapides sont extrêmement rares sur Mars. Cependant, sur des pentes assez fortes, ou dans certaines régions proches de l'équateur, on pense que les chances ne sont pas nulles de rencontrer des vents soufflant à cette vitesse. Il y a également un autre risque. Sur Mars, la poussière se dépose continuellement sur les panneaux solaires. Lorsque les explorateurs enlèveront la couche qui s'est accumulé (avec une simple brosse par exemple), il y a risque de rayures ! L'abrasion sera étudiée grâce au microscope et aux plaques (patch plates).
  • Corrosion : Elle peut être chimique ou électrochimique. Même si on connaît des exemples de corrosion entre deux solides, la présence d'eau accélère grandement le pouvoir corrosif d'une substance. Ici, il faudra étudier la réaction de l'eau avec les sols ou la poussière et l'éventuelle libération de sels, d'acides ou de substances alcalines qui peuvent attaquer le métal, les joints, la peau. Le potentiel corrosif sera surtout étudié en mélangeant des échantillons avec de l'eau, dans le laboratoire chimique humide (wet chemistry laboratory).
  • Toxicité et pathogénicité : La poussière martienne pourrait être toxique après contact avec la peau, inhalation ou ingestion. La substance la plus toxique risque bien d'être le quartz, à la fois pour les machines et pour les hommes (des particules respirables peuvent causer des maladies comme le silicose). Le microscope permettra de rechercher des particules de quartz, alors que d'autres toxines seront détectées grâce au laboratoire humide (wet chemistry laboratory).
  • Obstruction : la poussière martienne peut également poser des problèmes en obstruant les filtres, en se déposant par couches sur les panneaux solaires (en diminuant leur efficacité), en encrassant des joints, en bouchant les hublots, en masquant les consignes de sécurité inscrites sur des panneaux ou des appareils, en se déposant sur les lentilles des appareils scientifiques comme les caméras. L'étude du dépôt de la poussière sera étudiée grâce au microscope et aux plaques (patch plates). C'est la caméra PANCAM qui s'occupera de quantifier la charge atmosphérique globale en poussière.
  • Court circuits et problèmes électriques : La poussière peut conduire l'électricité et provoquer des courts circuits dans des systèmes électroniques délicats. La charge triboélectrique qui résulte des frictions entre les particules de poussière sera analysée par l'électromètre (ce phénomène est directement relié à celui de l'adhésion). Enfin, lors des tempêtes de poussières, l'atmosphère peut s'électrifier et provoquer des interférences dans les communications radios.
  • Radiations : Parmi les différents types de sources radioactives que l'on peut trouver sur Mars, seuls les aérosols contenant des particules radioactives peuvent causer des soucis importants. L'électromètre sera utilisé pour détecter les matériaux hautement radioactifs. Les matériaux faiblement radioactifs seront étudiés par l'instrument MARIE de l'atterrisseur.

L'expérimentation MECA comprend quatre d'instruments différents, qui seront desservis en échantillons par le bras articulé de l'atterrisseur :

  • Le laboratoire humide (wet chemistry laboratory) : Il va analyser les sols et la poussière en les mélangeant avec de l'eau et en mesurant la quantité d'éléments dissous, le potentiel redox (oxydoréduction), le pH, la conductivité, la présence d'ions métalliques lourds (As, Be, Cd, CI, F, Pb), de peroxydes, de bases, d'acides, de sels, l'émission de gaz et de vapeur, ainsi que le potentiel de corrosion. Le bras va prélever des échantillons qui passeront d'abord au travers d'un tamis à mailles fines, avant de se retrouver dans un tiroir mobile. Le matériel en trop est éliminé lors de la fermeture du tiroir. Une fois celui ci complètement fermé, le matériel se retrouve dans la chambre de réaction. On ajoute de l'eau, on mélange le tout et on peut commencer les mesures ! Grâce à des électrodes spécifiques à certains ions, nous pourrons connaître la présence et la concentration des principaux éléments mis en solution. L'ensemble contient quatre chambres de réaction identiques et séparées, qui recevront chacun des échantillons différents.
  • Le microscope : Il fournira quant à lui des images à haute définition des expériences en cours. Il va permettre de connaître la taille, le type (cristalline/amorphe, fibreuse/non fibreuses), la dureté, le pouvoir adhésif et abrasif des particules. Il combine un microscope optique et un microscope à effet tunnel (qui vont permettre ensemble d'étudier des particules dont la taille varie du millimètre au nanomètre) et un système de distribution des échantillons. Après le prélèvement par le bras de l'atterrisseur, le sol est mis en présence d'un certain nombre de substrat : aimants, plaquettes pour déterminer la dureté, fragments de tissus, métaux. L'abrasion et l'adhésion seront testées de manière directe sur des substrats sélectionnés.
  • Les plaques de tests (patch plates). Ces plaques (1 cm x 1 cm) sont disséminées sur l'atterrisseur et placés de telle manière que la caméra qui équipe le bras robotique de l'atterrisseur puisse y jeter un coup d'œil de temps en temps. L'atterrisseur de Pathfinder comportait des plaques identiques, mais la caméra mobile de l'atterrisseur permettra leur inspection de beaucoup plus prés. Deux plaques serviront aux tests d'abrasion, et deux autres pour les tests d'adhésion. Deux de ces plaques seront fixées sur le capot de l'instrument MECA (ou elles seront soumises au vent), une autre sera montée sur les pieds de l'atterrisseur, ou le sol sera directement déposé par la pelle du bras robotique. Enfin, la dernière sera fixée directement sur la pelle. L'abrasion sera étudiée en frottant de nombreuses fois cette plaque avec le sol, grâce au mouvement du bras robotique. Un miroir monté sur le bras permettra à la caméra d'imager cette plaque, invisible sinon pour l'objectif de la caméra. Les plaques sont fabriquées dans différents matériaux rentrant dans la confection des combinaisons spatiales: plastique, plexiglas de visière, nylon des gants, élastomères pour les joints. On trouve également des métaux, des filtres, des fragments de panneaux solaires, etc.
  • Enfin, un électromètre placé près de la pelle qui équipe le bras de l'astromobile va mesurer la charge triboélectrique (apparition d'électricité) pendant l'excavation du sol et l'ionisation de l'atmosphère due aux radiations émises par d'éventuelles particules radioactives. La position du bras et l'heure vont permettre de différencier les différents types d'ionisations (ionisation due au Soleil ou aux particules soufflées par le vent).

L'expérimentation MARIE

L' expérimentation MARIE (Martian Radiation Environment Experiment) va permettre de caractériser les radiations à la surface de Mars dans le but de déterminer les risques encourus par l'homme à la surface de Mars et de développer les contre-mesures appropriées. Les mesures concerneront les doses de radiations reçues en fonction du temps, avec une résolution de l'ordre de la minute, ainsi que l'étude du type de radiations (protons, neutrons, rayons cosmiques).

L'expérimentation MIP

L'objectif de cette expérimentation est audacieux. Il s'agit de valider les technologies permettant la production in situ de carburant à partir de l'atmosphère de Mars (ce qui permettra de réduire considérablement le coût et la masse d'une mission).

Le principe de fabrication de l'ergol est assez simple et utilise la réaction de Sabatier (ce n'est pas la peine de vous éclipser !). Un réacteur va combiner du CO2 avec de l'hydrogène en présence d'un catalyseur (comme le nickel ou le ruthénium) pour donner du méthane et de l'eau suivant cette réaction : CO2 + 4 H2 -> CH4 + 2 H2O. Ce qui est intéressant, c'est que le CO2 proviendra de l'atmosphère martienne (celle ci sera d'abord compressée, liquéfiée, puis purifiée). L'hydrogène sera par contre emporté depuis la Terre, ce qui n'est pas vraiment un handicap car la quantité nécessaire n'est pas importante. Le méthane produit servira de combustible. L'eau, soumise à une électrolyse, libérera de l'oxygène (comburant) et de l'hydrogène qui sera ensuite réinjecté dans le circuit. Le moteur utilisé pour consommer ce carburant brûlera donc du méthane et de l'oxygène. Ce mélange a déjà été étudié et il présente de bonnes performances, mais sa plus faible densité explique qu'on lui préfère le couple hydrogène/oxygène. La réaction de Sabatier est bien connue, mais l'appareillage n'est pas encore sorti du laboratoire. Selon les travaux de Robert Zubrin (dont le projet Reference Mission est inspiré), un dispositif de 20 kg seulement et une source d'énergie de 300 watts fournirait 400 kg d'ergols. On voit donc que le réacteur n'est pas disproportionné en taille et en consommation par rapport à la masse d'ergols produit. La fabrication de carburant à partir de l'atmosphère martienne n'est donc pas une vue de l'esprit !

Voyons maintenant les différents modules du package MIP (Mars In situ propellant production Precursor) :

  • MAAC (Mars Atmosphere Acquisition and Compression) dont le rôle est de pomper et de compresser le CO2 de l'atmosphère martienne.
  • OGS (Oxygen Generating System) dont le rôle est de générer de l'oxygène par électrolyse.
  • MTERC (Mars Thermal Radiator Characterization) dont l'objectif est d'évacuer la chaleur produite lors de la compression de l'atmosphère martienne.
  • MATE (Mars Array Technology Experiment) dont l'objectif est de caractériser l'environnement martien en terme de puissance solaire et de tester plusieurs types de cellules solaires. Cette expérience est décrite en détails ci dessous.
  • DART (Dust Accumulation and Removal Technology) qui partage le même boîtier que le MATE. Cette expérience va devoir caractériser le dépôt de la poussière sur les panneaux solaires et tester des méthodes permettant d'enlever la couche accumulée. Elle est décrite en détails ci dessous.

L'expérience MATE

L'énergie solaire entre pour une part importante dans l'alimentation d'une sonde, et il est vital d'utiliser cette énergie de manière optimale. C'est une ressource très importante pour la fabrication de carburant in-situ, du pompage de l'air et de sa compression jusqu'à la liquéfaction et le stockage des produits obtenus.

Pour cela, l'expérimentation MATE prévoit de tester plusieurs types de cellules, de mesurer leur performance mais aussi l'insolation globale et locale, la température des cellules et le spectre de la lumière pour connaître les longueurs d'onde les plus efficaces. De plus, les aérosols (poussière) présents dans l'atmosphère martienne peuvent diminuer l'intensité et altérer le spectre des rayons solaires qui arrivent au sol. MATE permettra de déterminer à long terme le rôle et l'influence des aérosols.

MATE comprend cinq paires de cellules solaires différentes (silicium cristallin, amorphe, arséniate de gallium, etc), 2 ensembles de cellules solaires, 2 radiomètres (insolation directe et globale), 8 senseurs sensibles à la température et 2 spectromètres (300 à 1100 nm et 900 à 1700 nm). La taille et le coût des panneaux solaires sont des facteurs importants à prendre en compte. L'utilisation de cellules solaires très fine (film) permettra à la fois de réduire le coût et la masse de panneaux solaires. Des cellules de ce type sont testées par l'expérience MATE.

L'expérience DART

Lors de la mission Pathfinder, les scientifiques ont noté une perte de 0,3 % par jour de la performance des panneaux solaires, à cause du dépôt continuel de la poussière martienne pendant les quatre premières semaines de la mission. L'expérimentation DART va permettre de quantifier ce dépôt, de déterminer les propriétés de la poussière accumulée, de mesurer la diminution des performances consécutif au dépôt et de tester plusieurs méthodes permettant d'enlever la poussière !

La poussière se dépose continuellement en temps normal, mais elle peut également s'accumuler à la suite d'évènements exceptionnels (tempêtes de poussières, activité de l'atterrisseur et de l'astromobile autour du site d'atterrissage). Le nettoyage périodique des panneaux solaires devient critique dés que la mission dépasse une certaine durée. Ce nettoyage doit être aussi simple que possible, et l'idéal serait qu'il soit réalisé de manière automatique, sans l'intervention des hommes (de façon à réduire autant que possible les sorties extra véhiculaires lors des missions habitées).

L'expérimentation comporte une cellule solaire de contrôle, deux lots de cellules solaires pour les expérimentations et des capteurs pour mesurer la quantité de poussière accumulée, l'opacité et la taille des particules. DART comprend deux instruments, un microscope et d'un dispositif hérité de la mission Pathfinder (MAE Dust Coverage Monitor). Dans ce dispositif, la poussière s'accumule sur une plaque transparente et une cellule solaire située juste en dessous mesure la quantité de rayons solaires qui traversent la plaque. Trois cellules différentes sont utilisées, ce qui permet de quantifier la perte de luminosité pour trois bandes spectrales. On trouve enfin un capteur dont la tâche sera de localiser le Soleil par rapport aux panneaux solaires, de manière à étudier les effets de la poussière en suspension dans l'atmosphère.

C'est bien beau d'observer l'accumulation de poussière, mais il faudrait peut être aussi songer à faire le ménage ! Dans un premier temps, on pourrait penser que le vent martien, lui même, lors de bourrasque, pourrait bien participer au nettoyage des panneaux solaires ! Comme la pression atmosphérique est faible, le vent doit souffler bien plus fort que sur Terre pour enlever une quantité significative de poussière. La vitesse minimale serait de 35m/s. Or, des vents soufflants au dessus de 15 mètres/s sont assez rares sur Mars (1% du temps). Il ne faut donc pas trop compter sur les vents martiens pour effectuer le boulot, même s'il peut effectivement agir en de rares occasions (grands vents, tourbillons).

Les particules qui constituent la poussière martienne sont très fines, avec une taille qui avoisine le micron. Les forces d'adhésion sont très fortes, et l'attraction électrostatique va sérieusement compliquer la tache des dispositifs de nettoyage. L'expérimentation DART se propose d'en tester deux :

  • Le premier mécanisme est très simple : Il suffit d'incliner les panneaux solaires pour que la poussière glisse vers le bas et s'en aille toute seule ! On sait, grâce aux missions Viking, que la poussière ne s'accumule que sur des surfaces horizontales, et qu'elle n'adhère pas sur des surfaces verticales, ou même inclinées. DART va permettre de confirmer ce fait et de mesurer l'angle minimal à partir duquel la poussière cesse de s'accumuler. Pour cela, des cellules inclinées à 30°, 45° et 60° seront utilisées. Une cellule inclinée à 30 ° sera de plus recouverte d'un film spécial qui réduira l'adhésion et l'abrasion.
  • Le deuxième dispositif est une méthode de nettoyage électrostatique. Un courant est appliqué à un conducteur transparent qui recouvre le panneau solaire. Les particules de poussière se chargent et s'écartent par répulsion les unes des autres, ce qui finit par provoquer l'expulsion de la couche de poussière. A la place d'une source électrique, on pourrait aussi utiliser une petite source radioactive pour charger les particules (Americium par exemple). Le nettoyage pourrait être effectué en continu ou de manière intermittente. Ici, trois cellules solaires sont testées : l'une avec un potentiel positif, l'autre avec un potentiel négatif et une troisième avec un champ électrique appliqué en permanence pour maintenir la poussière à l'écart, avant qu'elle ne s'accumule.

L'astromobile de Mars Surveyor 2001

L'atterrisseur de la mission Mars Surveyor 2001 devait emporter avec lui une astromobile (Athena) capable de se déplacer sur de longues distances à la surface de Mars. Il devait être plus gros que Sojourner (l'astromobile de Pathfinder) et conçu pour aller beaucoup plus loin que lui (100 km contre 100 mètres pour Sojourner). Sa durée de vie était également supérieure (1 an contre les 7 jours théoriques de Sojourner). D'un poids de 60 kg et alimenté en énergie par des panneaux solaires, il ne pouvait fonctionner que le jour.

Mais la NASA a en décidé autrement. La technologie nécessaire à la fabrication d'une batterie capable d'alimenter l'astromobile pendant toute la durée de sa mission n'est apparemment pas encore au point. L'astromobile coûtait beaucoup trop cher, sans compter la coupe budgétaire de 50 millions de dollars que le programme a subi (la somme a été réaffectée à la station spatiale internationale).

Le robot Athena ne partira donc qu'en 2003. La mission Surveyor 2001 emporte à la place une astromobile identique à celui de la mission Pathfinder, et dénommé Marie Curie. Il devrait emporter l'un des instruments du paquet APEX, le spectromètre APXS.

Un cadran solaire sur Mars !

La sonde Mars Surveyor 2001 va être l'objet d'une grande première. Elle va effectivement transporter ce qui deviendra le premier cadran solaire à fonctionner sur une autre planète.

Une fois que la sonde aura atterri et que l'orientation exacte du cadran aura été déterminée, celui ci pourra être utilisé pour suivre le passage des heures et des saisons sur Mars. Il faudra espérer que le cadran ne soit pas trop mal orienté, ni incliné de manière exagérée (l'un des pieds de l'atterrisseur pourrait toujours se poser sur une pierre un peu trop haute !).

C'est la caméra panoramique de Mars Surveyor 2001 qui sera chargée de photographier de manière régulière le cadran solaire. Il se pourrait bien que ce cadran solaire devienne  l'un des objets les plus photographiés de tout le système solaire. Des petits miroirs fixés sur l'anneau externe du cadran révéleront la couleur du ciel au dessus de l'atterrisseur, permettant ainsi de suivre les changements de couleur et d'aspect du ciel martien. L'heure martienne sera aussi consultable sur Internet. Un site web sera mis en place ou l'on pourra suivre la progression de l'ombre du piquet central sur une image virtuel du cadran.

Le cadran, non content de donner l'heure, va également servir à l'étalonnage (contraste et teinte) de la caméra panoramique, grâce à différentes cibles : trois cercles différents (noir, gris et blanc) et aux quatre coins de marques de couleurs différentes (jaune, rouge, bleu et vert).

Le cadran mesure 8 cm2 et pèse un peu plus de 60 grammes. Il sera fabriqué en aluminium, de manière à réduire au maximum son poids. Le métal anodisé sera noir et or. La surface qui portera les cibles pour le calibrage de la caméra PanCam sera constituée d'une sorte de caoutchouc siliconé. Les anneaux noirs, gris et blanc représentent les orbites de la Terre et de Mars, et les deux planètes sont figurées sous la forme de deux points bleu et rouge, dans leur position respective au moment de l'atterrissage de la sonde en 2002. Le Soleil est également figuré sous la forme d'un disque doré fixé au piquet central. Sur la face principale, on trouve le mot Mars retranscrit dans les principales langues utilisées par la majeure partie de la population terrestre (24 en tout), comme l'arabe, le braille, le chinois, le danois, l'anglais, le français, l'allemand, le grec, l'hébreux, l'italien, le japonais, le russe, le portugais, l'espagnol. Le sumérien et la langue maya y figurent aussi, car Mars a joué un rôle prépondérant dans ces cultures maintenant disparues.

Les quatre côtés du cadran portent enfin, gravé sur des panneaux dorés, un message accompagné de nombreux dessins d'enfants (plus de 160 dessins, concepts et idées d'enfants ont été proposées pour la réalisation de ce cadran solaire).

On peut y lire ses mots : "People launched this spacecraft from Earth in our year 2001. It arrived on Mars in 2002. We built its instruments to study the Martian environment and to look for signs of life. We used this post and these patterns to adjust our cameras and as a sundial to reckon the passage of time. The drawings and words represent the people of Earth. We sent this craft in peace to learn about Mars' past and about our future. To those who visit here, we wish a safe journey and the joy of discovery."

Cela donne à l'ensemble un côté optimiste, avec cette naïveté et cette part de rêve caractéristique de l'enfance combiné à une vision d'un futur ou l'espace aura une large place dans le cœur des hommes.

Red Rover Goes To Mars

L'astronaute John Glenn a annoncé lors d'une conférence donnée en avril 1999 que des étudiants âgés de 11 à 17 ans pourront réellement participer à la mission Mars Surveyor 2001 en contrôlant à distance l'astromobile Marie Curie et le bras robotique qui équipe l'atterrisseur ! Ce sera la première fois dans l'histoire de l'exploration spatiale que le public sera associé activement à une mission spatiale et au contrôle d'un véhicule situé sur une autre planète du système solaire. Certains étudiants travailleront avec les ingénieurs qui contrôlent le robot et ses déplacements, d'autres assisteront les membres de l'équipe scientifique chargée de recueillir et d'interpréter les données des instruments scientifiques. Ils partageront ensuite leur travail et les résultats avec le monde entier grâce à Internet. Des données provenant de Mars seront distribuées en temps réel dans chaque foyer, salle de classe ou centre scientifique. C'est le début d'un Internet planétaire !

Ce projet (Red Rover Goes To Mars) est une extension du projet Red Rover, Red Rover de la Planetary Society. Le projet Red Rover, Red Rover permet à des étudiants de contrôler à distance via Internet des robots miniatures (fabriqués en Lego !) sur des terrains qui simulent la surface martienne. 400 écoles de part le monde sont déjà équipées d'un robot et de l'installation qui va avec. La Planetary Society s'est également impliqué dans la mission Mars Surveyor 2001 avec un autre projet audacieux ...

The Student NanoExperiment Challenge

Un emplacement a effectivement été réservé sur l'atterrisseur de 2001 pour une nano-expérience qu'un petit groupe d'étudiants (de 1 à 3 personnes, chacune étant âgée de moins de 18 ans) devra entièrement mettre un point. Les contraintes sont plutôt nombreuses, mais le jeu en vaut la chandelle pour celui ou ceux qui relèveront le défi et remporteront le concours. Ce n'est pas toujours les jours que l'on a la chance de concevoir une expérience qui partira et fonctionnera sur Mars !

L'objectif de l'expérience est de mieux comprendre comment l'homme pourrait vivre sur Mars. Nous allons le voir, le challenge n'aura rien d'évident. L'expérience doit tenir dans un cylindre en aluminium de 1 cm de diamètre et de 1 cm de haut (un dé à coudre quoi !). Elle devra être entièrement autonome. Elle ne pourra pas communiquer avec les systèmes de l'atterrisseur et ne recevra aucune alimentation électrique. Si l'expérience a besoin de courant, elle devra le fabriquer elle même grâce à un panneau solaire par exemple, en respectant bien sur les normes de sécurité et le design de la mission. Le tout devra peser moins de 3 grammes. Les résultats seront uniquement récupérés par l'intermédiaire de la caméra fixée sur le bras robotique. Bien entendu, les matériaux devront être choisis de manière à survivre au lancement, à de nombreux mois dans l'espace, à l'atterrissage et à quelques semaines au moins sur Mars ! Il est interdit d'utiliser des liquides, des composés biologiques, du matériel radioactif (dommage, par de générateurs radio-isotopiques pour le courant !). L'utilisation de parties mobiles est déconseillée.

Cette nano-expérience prendra place sur l'atterrisseur au sein de l'expérimentation scientifique MECA, en plein milieu des plaques de tests (constituées de différents échantillons qui seront exposés aux rigueurs de l'environnement martien). Cette nano-expérience sera une opportunité formidable pour des étudiants d'acquérir des notions dans un grand nombre de domaines comme la conception d'un instrument, sa mise en œuvre, la récupération et du traitement des données reçues, etc. Les étudiants doivent dans un premier temps fournir un prototype de l'expérimentation, ainsi qu'une courte description. Ils doivent également tenir à jour un journal qui présente le développement de l'expérience. 10 finalistes seront alors sélectionnés. Les expériences choisies seront construites puis certifiés selon les normes en vigueur pour le spatial. Et si tout se passe bien, l'une d'elle sera intégré au paquet MECA !

Pour en savoir plus :

Go ! Chroniques martiennes : Un mince espoir pour l'atterrisseur de Mars Surveyor 2001.
Go ! Liste de liens concernant l'atterrisseur de Mars Surveyor 2001 (page de bibliographie).

L'atterrisseur de Mars Surveyor 2001

L'atterrisseur de la mission Surveyor 2001 (Crédit photo : NASA/JPL).

L'atterrisseur de Mars Surveyor 2001

L'atterrisseur de Mars Surveyor 2001 avec le dispositif d'étude des radiations (MARIE), la caméra de descente (MARDI), le dispositif d'étude de l'environnement martien (MECA) et le module permettant de valider la production de carburant in situ (MIP). Le bras mobile va servir pour le déploiement de l'astromobile (sur une distance maximale de 1 mètre) et pour les prélèvements d'échantillons (Crédit photo : NASA/JPL).

Marie Curie

L'astromobile de la mission Mars Surveyor 2001 ressemblera comme deux gouttes d'eau à Sojourner, le petit robot de la mission Pathfinder (Crédit photo : NASA/JPL).

Mars Surveyor 2001 : le paquet APEX

Schéma résumant la position des différents instruments scientifiques du paquet APEX : l'atterrisseur porte la caméra panoramique (PanCam) et un spectromètre travaillant dans le domaine infrarouge (Mini TES). Le bras robotique est muni du spectromètre Mössbauer. L'astromobile Marie Curie, presque identique au robot de Pathfinder, transporte un spectromètre (APXS), alpha proton rayons X (Crédit photo : NASA/JPL).

 

Labrot © 1997-2024. Dernière mise à jour : 30 juillet 2000. Des commentaires, corrections ou remarques ? N'hésitez pas, écrivez moi!

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