Ballons martiens

Pour découvrir les planètes du système solaire, les hommes n'ont jamais cessé de rivaliser d'ingéniosité. Après avoir exploré à distance les planètes depuis la surface de la Terre grâce à des instruments grossissants, ils ont envoyé sur place des véhicules robotiques. Depuis une orbite plus ou moins basse, des satellites d'observation se sont livrés à une reconnaissance globale de la planète, avant que des atterrisseurs ne rejoignent la surface pour étudier dans le détail une région ponctuelle. Plus récemment, le petit robot Sojourner a roulé timidement sur les terrains poussiéreux de Mars et la NASA a bien failli réussir à ficher dans le sous-sol du pôle sud des pénétrateurs. Mais il y a encore un moyen d'observation original que nous n'avons encore jamais envoyé sur la planète rouge, bien que cela ne soit pas faute d'avoir essayé : un ballon.

L'idée d'utiliser un ballon voyageant au grès des vents pour étudier la surface et l'atmosphère d'une planète est principalement due à un français, Jacques Blamont. En 1985, dans le cadre de la mission franco-soviétique Véga (dont l'objectif était l'étude conjointe de Vénus et de la comète de Halley), deux ballons ont erré dans la bouillante atmosphère vénusienne. Pendant 2 jours, ils ont parcouru une distance de 20 000 km en restant à une altitude pratiquement constante de 54 kilomètres. Pour ce projet ambitieux et un peu fou, les soviétiques, les français et dans une moindre mesure les américains avaient collaboré ensemble.

Les ballons présentent plusieurs avantages cruciaux par rapport aux autres moyens d'explorations. Non seulement la technologie mise en oeuvre est relativement simple et légère, mais ces appareils plus légers que l'air ne nécessitent aucune source d'énergie pour se déplacer ou pour voler, ce qui en fait des engins peu coûteux. Le rayon d'action des ballons est bien plus important que celui d'un rover et ils peuvent profiter de leur position avantageuse pour acquérir des images très précises des surfaces planétaires. Les clichés obtenus par un ballon sont idéals pour combler le vide qui existe entre les images à très haute résolution de la surface martienne prises par des atterrisseurs ou des rovers et les photographies peu détaillées acquises par les sondes orbitales.

Contrairement aux sondes classiques, le ratio entre le poids de la charge utile (les instruments scientifiques) et le poids total de l'engin est très avantageux dans le cas des ballons. Ainsi, il est possible d'embarquer 20 kg d'appareils scientifiques dans un engin qui ne pèse au final que 70 kg.

Insensibles aux dangers de la surface, les ballons peuvent survoler et étudier des régions qui restent inaccessibles aux stations fixes ou aux véhiculés motorisés. Paradoxalement, ces régions hautement accidentées sont souvent d'un intérêt scientifique majeur. Devant le succès de la mission Vega, on a tout naturellement pensé à décliner les ballons de Jacques Blamont dans une version martienne. Ceux-ci auraient du partir avec la mission franco-soviétique Mars 94, qui comprenait également le robot Marsokhod. Mars 94 devait partir du cosmodrome de Baïkonour en octobre 1994 et atteindre Mars en septembre 1995, après un voyage de 11 mois.

Le ballon martien de Mars 94

Design

Le design de l'aérostat martien de Mars 94 a évolué au cours du temps. Au début, l'ensemble était constitué de deux ballons différents fixés l'un au-dessus de l'autre par un câble. Le ballon supérieur sphérique renfermait de l'hélium. A lui seul, il pouvait seulement tenir la nacelle ou le cordon ombilical au-dessus du sol.

Le ballon inférieur ovale était constitué d'une enveloppe noire (très efficace pour capter la chaleur solaire) percée d'un orifice, qui permettait à l'air martien de circuler librement. Lorsque le soleil venait frapper ce ballon thermique, celui-ci s'échauffait, gonflait et finissait par décoller. C'est lui qui fournissait la poussée nécessaire au vol de l'ensemble. Le décollage se produisait lorsque la température de l'air à l'intérieur du ballon était de 55° supérieure à celle de l'air ambiant. Le soir, le ballon thermique perdait de sa prestance et se dégonflait comme une vieille baudruche trouée. Le tandem rejoignait alors la surface et le ballon supérieur, juste bon à supporter le poids de l'engin volant, empêchait tout contact désastreux avec le sol. Ce ballon double pesait 33 kg, dont 17 kg pour les deux ballons, 2 kg pour l'hélium du ballon supérieur et 14 kg pour la nacelle scientifique. Sa durée de vie, d'une dizaine de jours, était limitée par la décharge de ses batteries. Chaque jour il aurait pu parcourir 500 km dans les latitudes moyennes de la planète Mars.

Dans une version plus évoluée, le ballon thermique était équipé de clapets pour vidanger une partie de l'air chaud. Son dégonflage partiel permettait alors d'empêcher le décollage en matinée ou de forcer le ballon à se poser en plein jour.

L'aérostat martien a ensuite évolué vers une version simplifiée, qui ne comportait plus qu'un impressionnant cylindre translucide de 6000 m3 de volume rempli d'hélium. Haut de 45 mètres et large de 12 mètres, ce sac devait être taillé pour des raisons évidentes de poids dans un matériau à la fois léger et résistant. Le CNES avait jeté son dévolu sur du mylar de 6 microns d'épaisseur. La finesse considérable de l'enveloppe de plastique rendait très intense le risque de déchirure, le moindre accro pouvant ruiner la mission.  Or les occasions d'abîmer le fragile ballon ne manquaient pas.

Au moment du déploiement au-dessus de Mars, lorsque le ballon s'extirpait de son conteneur, la fine enveloppe ne devait pas frotter sur les parois de la capsule métallique, sous peine d'encourir une déchirure fatale. Au moment du gonflage, une injection trop brutale de l'hélium pouvait aussi endommager la structure. Le jet de gaz était donc brisé par des buses d'injection spéciales et le remplissage était étalé sur 4 minutes pour éviter tout risque de perforation. Enfin, en cours de mission, le ballon ne devait en aucun cas rentrer en contact avec la surface martienne, que ce soit au cours du déploiement ou pendant ses pérégrinations. L'ensemble pesait 60 kg, dont 30 kg pour la charge scientifique et 30 kg pour le ballon lui-même.

Cycle de fonctionnement

Au petit matin, entre 9 et 10 heures, les premiers rayons du soleil viennent lécher l'enveloppe du ballon et le gaz interne se réchauffe imperceptiblement. Lentement, le ballon commence à prendre de l'altitude. En fin de matinée, transporté par les vents, il se déplace à 6000 mètres de hauteur, une altitude qui ne variera guère au cours de l'après midi.

En début de soirée, tandis que le Soleil se couche, les températures se mettent à décliner et le ballon amorce sa descente vers le sol, pour finalement venir se stabiliser à quelques mètres seulement de la surface martienne. Maintenu au sol par son cordon ombilical qui joue le rôle d'une ancre en compensant les variations infimes de la portance de l'air nocturne, le ballon se balance mollement dans la froide nuit martienne. Le lendemain matin, le ballon repartira avec le soleil vers une autre destination et continuera son périple dans les cieux de la planète rouge.

Capable de décoller et de voler sans lâcher le moindre gramme de lest et sans perdre dans l'atmosphère martienne la moindre molécule de son précieux gaz (sauf par une diffusion inéluctable à travers les enveloppes plastiques), le ballon martien était un dispositif particulièrement astucieux et élégant.

Alimentation énergétique

Le ballon tirait son énergie d'un ensemble de petites batteries insérées dans le cordon ombilical, qui lui assurait une durée de vie de 10 jours. Après cette courte période, il aurait continué pour un temps son ballet dans le ciel martien, avant d'être plaqué au sol ou aplati contre une falaise par les violentes bourrasques d'une tempête de poussière.

Instrumentation scientifique

La charge scientifique du ballon était répartie dans une nacelle, fixée juste en dessous du ballon et dans un cordon ombilical (guiderope) accroché sous la nacelle.

La nacelle embarquait une caméra à haute résolution qui suivant l'altitude, pouvait réaliser des prises de vue d'une résolution de 1 mètre par pixel à quelques centimètres par pixel. Une batterie de spectromètres avait pour rôle d'étudier la physique et la chimie de la surface. Un radar aurait aussi permis de rechercher des poches d'eau ou de glace dans le sous-sol.

Le cordon ombilical se composait de petits éléments interconnectés parmi lesquels on trouvait des batteries, des éléments chauffants pour lutter contre le froid martien, le système de transmission de données, divers instruments scientifiques et une antenne pour les télécommunications.

Qu'il soit dans les airs ou à proximité du sol, une station météorologique répartie sur la nacelle et le cordon devait mesurer la pression atmosphérique, la température, l'humidité, la vitesse et la direction des vents, la composition chimique et la teneur de l'air en aérosols (particules de poussière).

En période nocturne, lorsque le ballon flottait et ondulait à quelques mètres de la surface, son cordon ombilical traînait de façon négligée au sol. Étant à ce moment là en contact avec la surface, certains instruments pouvaient se livrer à une étude directe des roches et du sol.

Télécommunications

Les données collectées par les instruments du ballon devaient être relayées par la sonde Mars Observer qui avait été équipée pour l'occasion d'un relais radio. Mars Observer devait terminer sa mission au moment de l'arrivée des ballons en septembre 1995, mais ce programme fut complètement chamboulé. Mars Observer disparu à trois jours de sa mise en orbite le 21 août 1993. Le lancement des ballons, d'abord prévu dans le cadre de la mission Mars 94, fut repoussé à 1998 (mission Mars 98). Mais après l'échec désastreux de Mars 96 en novembre 1996, Mars 98 fut annulée, et les aérostats martiens ne quittèrent jamais le plancher des vaches.

Des ballons plus évolués

Les ballons de Mars 94 étaient certes intéressants, mais étant entièrement soumis aux caprices de l'atmosphère, ils étaient relativement difficiles à contrôler. D'autres modèles de ballons plus performants ont depuis été envisagés.

Le contrôle des mouvements verticaux est la première étape logique dans la mise au point d'un ballon intelligent et autonome. Un tel ballon pourrait être à même de surveiller la régularité de sa montée, d'atteindre une altitude de croisière déterminée ou de se fixer un plafond à ne pas dépasser. Il pourrait aussi forcer son atterrissage en plein jour lors du survol d'une région intéressante.

La descente en fin d'après midi pose un problème particulier, et sa maîtrise pourrait devenir essentielle. Lorsque la chaleur du soleil commence à décliner, le ballon amorce sa descente. D'abord lente, celle-ci finit par devenir de plus en plus rapide au fur et à mesure du refroidissement de l'atmosphère et le risque d'un crash final n'est donc pas à exclure. L'idéal serait de débuter la descente assez tôt, par exemple en milieu d'après midi. Il y aurait ainsi assez de chaleur pendant toute la durée l'opération pour assurer une dégringolade douce et régulière, à une vitesse inférieure à 1 mètre par seconde.

Après le contrôle des mouvements verticaux, l'étape suivante consiste à se rendre maître, dans une certaine mesure, des mouvements horizontaux. Les contrôleurs pourraient ainsi aisément diriger le ballon vers des endroits intéressants tout en évitant des reliefs dangereux.

Pour contrôler ses mouvements, le ballon devra posséder une centrale de navigation qui lui indiquera à tout instant sa vitesse, son altitude et sa position. Un ordinateur de bord analysera les conditions atmosphériques et la tendance météorologique pour optimiser au maximum les déplacements et profiter intelligemment des courants aériens.

Quels sont les techniques sur lesquelles un ballon pourrait s'appuyer pour contrôler ses mouvements ? Parmi les astuces classiques, on trouve les valves ou les clapets pour vidanger une partie de l'air dès que l'altitude souhaitée à été atteinte. Il est également possible, comme sur Terre, de lâcher du lest, mais avec une petite nuance. Plutôt que de larguer des sacs de sable ou des masselottes de plomb inutiles, le ballon abandonnerait derrière lui des petites stations météorologiques qui une fois au sol se mettraient à fonctionner (l'envoi d'un kilo sur Mars coûte déjà assez cher comme ça, vous ne croyez tout de même pas qu'on va envoyer des trucs qui ne servent à rien !). Il serait aussi intéressant de pouvoir modifier les propriétés absorbantes du revêtement des ballons thermiques. L'enveloppe d'un ballon pourrait par exemple comporter une section claire, une section sombre, une section dorée et une section aluminisée. Suivant le niveau de réflexion ou d'absorption souhaitée, le ballon tournerait sur lui-même pour présenter telle ou telle face au soleil. Pour les mouvements horizontaux, la seule solution est d'embarquer un dispositif de propulsion (genre hélice) alimenté par des panneaux solaires.

Vous vous en doutez, tous les systèmes que l'on serait obligé d'embarquer sur les ballons pour pouvoir les diriger consommeraient un poids important et prendraient forcément la place de certains instruments scientifiques. Un compromis devrait alors être trouvé entre souplesse de guidage (qui accroît longévité, utilité et retour scientifique) et charge scientifique.

Dernier point pouvant faire l'objet d'une amélioration, les enveloppes. L'idéal serait de trouver un matériau très léger et résistant, qui limiterait de surcroît la diffusion des gaz, le risque de fuites ou la détérioration des propriétés thermiques (dans le cas des ballons thermiques).

Le programme "Aerobot" de la NASA

Dans le cadre de son programme "Aerobot", la NASA espère justement développer des ballons autonomes et intelligents, dignes descendants des ballons des sondes Vega ou du ballon martien de la mission Mars 94. Les différents appareils de la gamme, qui portent pour l'instant des signes barbares dont raffolent les américains, sont décrits ci-dessous.

MABTEX

La mission MABTEX (Mars Aerobot Technology Experiment) est un démonstrateur technologique qui doit permettre de valider les technologies qui seront utilisées plus tard sur les missions suivantes. Il s'agit ici de tester le vol d'un ballon surpressurisé pour étudier l'atmosphère et la surface de Mars, ainsi que le mécanisme de déploiement et de gonflage (des prises de vue devant permettre de s'assurer du bon déroulement des opérations). Le ballon sera déjà autonome, puisqu'il pourra contrôler son altitude. Des capacités limitées de navigation lui permettront aussi de connaître sa position, sa vitesse et son attitude (c'est à dire son orientation). Le ballon emportera une caméra pour obtenir des images de la surface et un modèle d'une plate-forme à instruments qui pourrait comporter un spectromètre et un magnétomètre. Cette mission pourrait être réalisée dans le cadre des micromissions. Après un passage à proximité de la Lune puis de la Terre, la sonde serait injectée sur une trajectoire martienne, ou elle délivrerait une masse de 30 à 40 kg. Une fois dans l'atmosphère, le ballon et sa nacelle pèseraient seulement 10 kg. La durée de vie de MABTEX est d'une semaine.

MGA

Avec la mission MGA (Mars Geoscience Aerobot), on réalise un pas en avant. Ce ballon pourra transporter une charge utile 10 fois supérieure à celle de MABTEX. Grâce à une foule d'instruments scientifiques, il pourra examiner le magnétisme fossile de Mars, sonder le sous-sol à la recherche de glace ou d'eau, analyser la composition chimique de la surface grâce à des spectromètres infrarouges et étudier le climat et la météorologie de la planète rouge. Des caméras stéréoscopiques capables de regarder sur les côtés photographieront à très haute résolution le sol et un module disponible en option lui permettra même de larguer de petites stations scientifiques. La mission de MGA s'étalera sur 3 mois, au cours desquels l'aérostat pourra faire 25 fois la tour de la planète. MAG profitera de toutes les technologies validées par MABTEX, et pourra contrôler de façon limitée son altitude, en tirant avantage de la vitesse et de la direction des courants aériens. Il sera cependant encore tributaire des vents pour se déplacer et il ne possédera pas de dispositif de propulsion propre pour modifier sa trajectoire.

MASEPA

Le ballon MASEPA (Mars Solar Electric Propelled Aerobot) représente le fin du fin en matière d'aérostation spatiale. Grâce à des panneaux solaires alimentant un dispositif de propulsion, il pourra contrôler son déplacement horizontal, en permettant à ses puissants instruments d'examiner virtuellement depuis 10 kilomètres d'altitude n'importe quelle région de la surface martienne. Rempli d'hélium ou d'hydrogène, le volume du ballon sera constant, et son altitude sera stable jour et nuit. L'enveloppe de MASEPA sera assez rigide pour pouvoir supporter sans dommage la poussée du moteur.

Montgolfière solaire

Bien qu'économique, souple et léger, les ballons surpressurisés de la mission franco-américaine Vega ou les sacs translucides d'hélium de la mission Mars 94 possèdent un concurrent sérieux : la Montgolfière !

Construite par les deux frères français Joseph et Etienne de Montgolfier, la première Montgolfière vola pour la première fois avec un passager humain en 1783. Le 21 novembre de cette année, deux individus intrépides, Jean François Pilâtre de Rozier et François Laurent montèrent dans une Montgolfière et effectuèrent le premier vol aérien en survolant Paris (un mois auparavant, histoire de s'assurer de l'innocuité de l'atmosphère terrestre, on avait installé dans la nacelle un canard, un coq et un cochon !). Dans quelques années, la plus simple et la plus vieille machine volante pourrait bien de nouveau reprendre du service sur les autres planètes du système solaire.

Contrairement aux ballons qui renferment des gaz plus légers que l'air comme l'hélium ou l'hydrogène, les montgolfières fonctionnent à l'air chaud. Celui-ci peut être réchauffé avec des brûleurs, mais il est également possible de compter sur le rayonnement solaire. Durant le jour, le ballon et l'air qu'il contient sont chauffés par le soleil tandis que la nuit la chaleur est dispensée par le rayonnement infrarouge émis par la surface et les couches d'air plus basses et plus chaudes.

Sur Mars, les températures nocturnes sont malheureusement trop basses pour permettre à une Montgolfière de tenir en l'air pendant la nuit. Celle-ci est donc obligée d'atterrir, ce qui n'est pas un inconvénient, puisque l'on peut en profiter pour déposer au sol des petits stations ou des robots mobiles miniatures.

Par rapport aux ballons à hélium ou hydrogène, les Montgolfières offrent quelques avantages de poids. D'abord, leur déploiement est plus aisé, puisque l'on utilise l'air martien pour le gonflage. Ensuite, elles ne nécessitent pas de lourds réservoirs de gaz : exit donc la tuyauterie qui va avec et le système de refroidissement qui dont fonctionner jusqu'à l'arrivée sur Mars. Enfin, les Montgolfières supportent assez bien de petites déchirures.

Nous venons de l'évoquer, sur Mars les Montgolfières sont obligées de rejoindre la surface à la nuit et elles pourraient donc remplacer avantageusement les systèmes d'atterrissage classiques coûteux et lourds (airbags ou rétrofusées). Dans ce domaine, la NASA a mis au point un système qui permet, en ventilant l'air chaud à travers un clapet, de réaliser de multiples atterrissages de précision relativement doux (vitesse inférieure à 1 m/s).

La mission d'une Montgolfière martienne pourrait se dérouler de la façon suivante. Après largage et décélération dans l'atmosphère, le bouclier thermique est largué. Vers 8 kilomètres d'altitude, la Montgolfière commence à se remplir d'air, qui ne tarde pas à se réchauffer sous les rayons du Soleil. Entraînée vers le bas par le poids de sa charge utile, la Montgolfière rejoint en douceur le sol martien. Elle dépose alors son encombrant fardeau (par exemple un rover gonflable) puis, fortement allégée, elle reprend son envol. Elle peut alors se livrer à des études scientifiques. Les atterrissages nocturnes suivants seront l'occasion de déposer de petites stations secondaires sur la surface martienne. Avec ce système d'atterrissage, le pourcentage de la charge utile par rapport à la masse totale nécessaire à la dépose passe de 10 à 50 %, un gain vraiment appréciable !

Conclusion

Même si les ballons de Mars 94 n'ont jamais pris le chemin de Mars, ils sont toujours d'actualité. Envisagés dans le cadre des micromissions, ils pourraient aussi réapparaître dans une mission de la classe Discovery de la NASA. Si le Centre National d'Etudes Spatiales français (CNES) n'a pas l'intention, dans le cadre de son programme martien, de ressortir les maquettes et prototypes qui avaient été réalisés pour Mars 94, la NASA pourrait reprendre le flambeau et nous aurons peut être la chance, dans un avenir proche, de voir des ballons évoluer avec grâce dans l'atmosphère ténue et poussiéreuse de la planète rouge.

Pour en savoir plus :

Go ! Liste de liens concernant les ballons martiens (page de bibliographie).

La sonde Mars 94

La sonde Mars 94 (Crédit photo : CNES).

Séquence de largage du ballon martien de la mission Mars 94

Séquence de largage du ballon martien de la mission Mars 94. Après la rentrée atmosphérique et l'ouverture du parachute, le ballon soigneusement plié en accordéon s'extirpe de son cylindre métallique. Le bouclier thermique est largué mais reste attaché au ballon par un filin. A 10 000 kilomètres d'altitude, 6000 m3 d'hélium sont injectés à raison de 25m3/s dans la fragile enveloppe, tandis que le parachute est abandonné. Le ballon descend alors à vive allure vers la surface martienne, entraîné par la masse du bouclier thermique. Celui-ci est finalement abandonné à 400 mètres d'altitude. Le ballon se stabilise et peut commencer ses va et vient entre la surface et les airs. Le ballon martien de la mission Mars 94 était une structure extrêmement volumineuse. Avec une hauteur de 45 mètres et un diamètre de 12 mètres, le ballon était aussi haut qu'un immeuble de 15 étages. Dans le ciel martien, il aurait ressemblé à un point d'exclamation géant. Outre le ballon, la mission Mars 94 comportait un rover baptisé Marsokhod qui apparaît également sur ce dessin (Crédit photo : CNES/David Ducros).

Cycle de fonctionnement du ballon martien de la mission Mars 94

Cycle de fonctionnement du ballon martien. En début de matinée, les rayons du soleil viennent chauffer le ballon. Le gaz rentre en expansion et la pression à l'intérieur du ballon augmente. Celui-ci se gonfle et commence à s'élever. Il se stabilisera à une altitude de 6000 mètres. En milieu d'après midi, l'énergie solaire s'amenuise et le ballon commence à se refroidir. Il entame alors une descente progressive vers la surface. Vers 18 heures, il flotte à quelques mètres seulement de la surface, une partie de son cordon ombilical reposant au sol. Le lendemain matin, le ballon reprendra à nouveau son envol avec les premiers rayons du soleil. Les instruments scientifiques, accrochés à la nacelle ou au cordon que le ballon traîne derrière lui, devaient fonctionner pratiquement en continu en étudiant l'atmosphère et la surface martienne (Crédit photo : CNES/David Ducros).

Zone de couverture d'un ballon martien

Entre les images incroyablement précises obtenues depuis le sol par les atterrisseurs ou les rovers et les clichés des orbiteurs (1), il y a un gouffre que les ballons pourraient combler. Oeuvrant à quelques kilomètres d'altitude, les ballons bénéficient d'un point de vue unique sur la surface martienne et peuvent couvrir une zone bien plus large que des véhicules d'exploration mobiles (Crédit photo : NASA/JPL).

Un ballon martien américain

La NASA planche depuis de nombreuses années, dans le cadre du programme "Aerobot", sur des ballons plus autonomes et intelligents que celui de la mission Mars 94. Parmi les objectifs scientifiques que ces ballons devraient remplir, on trouve l'étude à très haute résolution de la morphologie de la surface martienne, la recherche de substances volatiles (eau, CO2), l'analyse de la circulation atmosphérique globale, la détermination de la composition et des propriétés thermophysiques du sol et enfin le déploiement de petites stations très légères (quelques centaines de grammes) le long de la trajectoire suivie par les ballons (Crédit photo : NASA/JPL).

Un ballon au-dessus de la surface martienne

Sur ce dessin d'artiste haut en couleurs (un peu trop peut-être !), un ballon survole la surface martienne en trimballant une petite nacelle. Surpressurisé, il évolue à une altitude constante. Un cratère d'impact entouré de sa couronne d'ejecta lobés apparaît dans le coin supérieur droit (Crédit photo : NASA/JPL).

Une Montgolfière martienne

Une Montgolfière, l'une des plus simples et des plus vieilles machines volantes, se déplace au-dessus du grand canyon de Valles Marineris, dans Ophir Chasma. Durant la journée, les rayons du soleil viennent chauffer l'air contenu à l'intérieur de la Montgolfière. Malheureusement, la surface martienne n'irradie pas assez d'infrarouges pendant la nuit pour prolonger le chauffage. La Montgolfière ne peut donc voler qu'en journée et la nuit, elle est condamnée à atterrir (ce qui peut être une excellente occasion de délivrer des petites stations ou des rovers). Dans les basses latitudes martiennes, une Montgolfière pourrait voler pendant une dizaine d'heures. Les longs étés polaires lui permettraient peut être de se maintenir en l'air pendant quelques mois.(Crédit photo : NASA/JPL).

 

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