Trajectoires interplanétaires

Cela fait plusieurs années que cette idée trotte dans votre tête, mais cette fois ci c'est décidé, vous allez partir en vacances sur la planète Mars, ou plus simplement, vous voulez lancer une modeste sonde spatiale pour vous rendre compte par vous-même de la hauteur des volcans martiens. Seulement voila, ce n'est pas faute d'avoir cherché, mais vous n'avez trouvé aucun guide touristique qui explique en détails comment vous rendre là bas. Quand faut-il partir, quelle fusée choisir, vos questions sont restées sans réponses. Ayant moi-même rencontré ces problèmes de base, j'ai décidé de créer cette page qui vous expliquera en long, en large et en travers la méthode à suivre pour atteindre la planète de vos rêves.

Une boite de vitesse à trois positions

La première préoccupation de tout vaisseau spatial qui voudra se diriger vers la planète rouge sera d'échapper à la force d'attraction qui émane du puits de gravité terrestre. Pour voyager dans le système solaire et suivant les objectifs à atteindre, on a définit 3 vitesses différentes que l'on nomme vitesses cosmiques. 

La première vitesse cosmique (7,9 km/s) définit la vitesse qu'il faut atteindre pour pouvoir se placer en orbite autour de la Terre. Si la vitesse d'une sonde est inférieure à cette vitesse, l'engin suit une trajectoire balistique en décrivant une belle courbe mais finira toujours par retomber un peu plus loin. Par contre, si la première vitesse cosmique est dépassée, la satellisation autour de la Terre est effectuée et la sonde ne cessera de tourner autour de notre planète en suivant une orbite circulaire.

La deuxième vitesse cosmique (11,2 km/s) représente la vitesse limite permettant de s'évader définitivement de l'influence gravitationnelle de la Terre. Cette vitesse est également connue sous le nom de vitesse de libération. Si vous réglez la vitesse du vaisseau entre la première et la deuxième vitesse cosmique, vous tournerez toujours autour de la Terre, mais en suivant une orbite non plus circulaire mais elliptique (si la vitesse de l'engin spatial est égale à 11,2 km/s, la trajectoire qu'il suivra sera une parabole). D'un autre côté, si un vaisseau lancé depuis la Terre possède une vitesse supérieure à 11,2 km/s, il s'échappe de l'influence terrestre sur une orbite hyperbolique.

Enfin, si vous avez vraiment besoin de changement, vous pouvez lancer votre vaisseau à une vitesse supérieure à la troisième vitesse cosmique. A ce moment là, vous avez assez d'énergie pour sortir complètement du système solaire et partir pour un petit voyage vers les étoiles. Mais ce cas un peu extrême ne va pas nous intéresser ici.

Quitter la Terre

Pour quitter la Terre et partir en direction de Mars, il faut donc donner à votre vaisseau une impulsion telle qu'il puisse dépasser la deuxième vitesse cosmique (Ve). Mais n'allez pas croire que seul le lanceur participe à l'impulsion initiale donnée à une sonde. Les engins spatiaux lancés à destination des autres planètes profitent avant tout de la vitesse de révolution de la Terre autour du Soleil et non pas de la vitesse fournie par le fonctionnement de leur moteur. Notre planète avance en effet sur son orbite à une vitesse d'environ 108 000 km/h ! Il serait dommage de ne pas profiter un peu de cette formidable poussée que procure le mouvement de la Terre. 

La vitesse d'une sonde injectée sur une orbite héliocentrique représente donc la somme vectorielle de la vitesse de la Terre autour du soleil (Vt, 29,8 km/s ou 108 000 km/h) et d'une partie de la vitesse (Vr) que le lanceur a communiqué à la sonde. La vitesse Vr est appelée vitesse résiduelle. Elle correspond en gros à la différence entre la deuxième vitesse cosmique et la vitesse fournie par le lanceur. Après avoir payé les 11,2 km/s nécessaires pour échapper à l'attraction de la Terre, la vitesse restante est entièrement à la disposition de la sonde pour son voyage Terre - Mars.

Maintenant que vous connaissez la vitesse à atteindre pour partir vers Mars, il ne faut parler un peu de la direction ! Pour atteindre la planète rouge qui fait partie du système solaire externe, il faut partir dans la même direction que celle que la Terre suit sur son orbite. Par contre, pour atteindre une planète du système solaire interne (c'est à dire une planète située entre la Terre et le Soleil, comme Vénus), il faut penser à partir dans la direction opposée à celle du déplacement de la Terre.

Voyage en classe économique : l'orbite de transfert de Hohmann

En résumé, on peut donc penser que pour s'offrir une croisière martienne, il n'y a qu'à propulser dans la bonne direction un engin spatial à une vitesse suffisante pour que celui ci s'échappe de l'influence terrestre. Une fois dans l'espace, le vaisseau affine son orientation, allume son propre moteur et commence son voyage. Le hic, c'est qu'un voyage classique dure de nombreux mois. Comme les distractions sont rares dans l'espace et que les étoiles se ressemblent toutes lorsqu'elles sont vues à travers un hublot, le voyage risque vite de tourner au cauchemar, tant il sera ennuyeux. Mais qu'importe ! Pour aller un peu plus vite et réduire la durée du trajet à quelques semaines, la sonde n'aurait qu'a être équipé d'un moteur puissant dotés de réservoirs de carburant conséquents...

Malheureusement, les réserves de carburant d'une sonde sont forcément limitées à cause du poids et les lanceurs actuels, aussi puissants soient-ils, ne peuvent tout simplement pas lancer des dizaines et des dizaines de tonnes vers une autre planète. Sans compter que tout supplément de poids dans une mission à un coût absolument rédhibitoire. Il a donc fallu trouver une solution économique pour le lancement des sondes.

Pour effectuer un voyage qui soit le plus économique possible en direction de Mars, un vaisseau spatial doit suivre une trajectoire elliptique dont l'une des extrémités touche la Terre et l'autre Mars. En d'autres termes, le vaisseau est placé sur une orbite solaire dont le périhélie (le point de l'orbite le plus proche du Soleil ) est occupé par la Terre et dont l'aphélie (le point de l'orbite le plus éloigné du Soleil) est occupé par Mars.

Ce type de trajectoire permet de transférer un objet entre deux planètes avec une dépense énergétique minimale. Elle a été découverte par un ingénieur allemand en 1925 (Walter Hohmann). C'est pourquoi on l'appelle souvent trajectoire de transfert de Hohmann. Si l'on considère que les orbites martiennes et terrestres sont parfaitement circulaires (ce qui n'est en fait pas le cas), l'orbite de transfert de Hohmann est tangente à l'orbite de la Terre au point de départ et tangente à l'orbite de Mars à l'arrivée. On distingue de plus deux types de trajectoires. Si une sonde emprunte une orbite de transfert qui dessine un angle inférieur à 180° autour du soleil, on qualifie cette trajectoire de type I. Par contre, si la sonde suit une trajectoire de plus de 180° autour du soleil, l'orbite est dite de type II. 

Les fenêtres de tir : quand faut-il partir ?

Ce paragraphe va nous permettre d'illustrer l'une des plus belles originalités des voyages interplanétaires. Lorsque vous vous déplacez sur la Terre, vous suivez en général une trajectoire qui vous amène droit vers votre destination, une destination qui demeure dans la même position relative vis à vis de votre point de départ. Ce n'est pas du tout le cas pour les sondes interplanétaires. La trajectoire que l'on imprime à un vaisseau spatial pointe dans une direction qui est totalement inoccupée au moment du départ. Ce n'est qu'au terme du voyage que le point d'arrivée sera occupé par la planète que l'on désire atteindre. C'est cette mobilité de la cible à atteindre et la ronde perpétuelle des planètes autour du soleil qui explique que les lancements ne peuvent avoir lieu qu'à l'intérieur de périodes bien déterminées dans le temps. On désigne ces périodes propices aux lancements sous le nom de fenêtre de tir.

Une sonde lancée sur une orbite de transfert de Hohmann mettrait 520 jours pour en faire le tour. Comme la Terre est située au périhélie et Mars à l'aphélie, une sonde ne doit parcourir que la moitié de cette orbite pour arriver à destination soit 260 jours. Pendant ce laps de temps, la planète Mars aura parcouru une certaine distance, que l'on peut calculer aisément. Mars boucle un tour en 687 jours (c'est la durée d'une année martienne). Depuis sa position au moment du lancement, la planète aura donc parcouru un angle de 260/687 x 360°, soit 136° autour du soleil. On peut alors calculer la position relative de la Terre et de Mars au rapport au soleil pour que le lancement soit réussi et que le vaisseau arrive à atteindre sa destination : 180° - 136° = 44 °. Ainsi, les lancements ne sont possibles que lorsque la terre est située 44° en arrière de la planète Mars. Cette condition n'apparaît que tous les 26 mois, 50 jours en moyenne avant les oppositions (en période d'opposition, Mars est au plus proche de la Terre et l'angle Mars - Soleil - Terre vaut alors 0°).

Seules les sondes lancées à l'intérieur d'une fenêtre de tir ont une chance d'atteindre Mars. Notez que pendant le vol, les planètes vont continuer leur ballet autour du soleil. Pendant les 9 mois nécessaires au parcours de la moitié de l'orbite de transfert, la planète Terre va rattraper Mars et lui passer devant ! Au moment de l'arrivée, notre planète se retrouvera même à 90° devant Mars ! Rien ne sert de courir, il faut partir à point !

Si un vaisseau qui part au moment de l'ouverture d'une fenêtre de tir est assuré d'arriver à destination, la date du départ à l'intérieur de la fenêtre a tout de même une certaine importance. Pour le comprendre, prenons l'exemple de la sonde Mars Climate Orbiter. Sa fenêtre de tir s'ouvrait le 10 décembre et se refermait le 25 décembre. La sonde, après avoir été immobilisée un jour sur son pas de tir, a finalement pu s'envoler le 11 décembre, c'est à dire au début de la période autorisant le lancement. Si le lancement n'avait pu avoir lieu pour différentes raisons (problèmes techniques, mauvaises conditions météorologiques) qu'à la fin de la fenêtre de tir, la vitesse de la sonde aurait été plus élevée lors de son arrivée sur Mars et la période de l'orbite suivie après la manœuvre d'insertion orbitale aurait été d'environ 20 heures, contre 12 heures si la sonde pouvait partir à temps dès le début de l'ouverture de la fenêtre de tir. Quelle que soit la période de l'orbite suivie par la sonde après la manœuvre d'insertion orbitale, celle ci devait être ramenée à 2 heures par aérofreinage. On comprend alors l'importance d'un départ à temps. Un léger retard dans le lancement, et la période de révolution de l'orbite initiale autour de Mars passait de 10 à 20 heures. 8 heures de trop qu'il fallait alors enlever en prolongeant l'aérofreinage et en retardant le moment ou la sonde allait enfin se retrouver sur son orbite finale de cartographie. Notons ici que Mars Climate Orbiter devait également absolument être à poste avant l'arrivée de Mars Polar Lander pour pouvoir supporter cette mission et jouer le rôle de satellite relais. Un allongement de la période d'aérofreinage n'était guère souhaitable dans cette situation. De toute façon, toutes ses considérations ne sont finalement que purement théoriques car la sonde s'est lamentablement crashée lors de la mise en orbite...

Les orbites de la Terre et de Mars ne sont pas parfaitement circulaires, et elles ne sont pas situées dans le même plan. Ainsi, les fenêtres de tir ne sont pas identiques entres elles, certaines étant plus favorables que d'autres. Par exemple, lors d'une opposition périhélique (Mars passe alors au plus près du soleil) , la distance entre Mars et la Terre est bien moins importante que lors d'une opposition aphélique (ou la planète Mars est la plus éloignée du soleil). En opposition périhélique, la distance Terre-Mars est de 56 millions de kilomètres, contre 100 millions dans le pire des cas pour une opposition aphélique. En 2003, Mars va passer à 56 millions de kilomètres de la Terre. Ce sera donc une année exceptionnelle pour lancer des sondes et il n'y a rien d'étonnant à constater que les départs programmés pour cette année seront effectivement très nombreux (voir en particulier le tableau chronologique).

Couper dans les virages

Un vaisseau qui voudrait voler à l'économie peut donc emprunter l'orbite de transfert de Hohmann. Il ne dépensera qu'un minimum d'énergie, mais mettra en moyenne 9 mois pour atteindre sa destination. Une durée qui peut paraître bien longue pour certains impatients.

Il est heureusement possible de doter la sonde d'un minimum de carburant pour son voyage entre la Terre et Mars et de couper sauvagement dans les virages ! En fonction de leur poids et de la quantité de carburant embarquée, les sondes peuvent emprunter des trajectoires plus tendues et plus rapides (6 mois de voyage contre les 9 mois en classe économique). Bien entendu, plus la sonde peut aller vite, plus court est le voyage (au grand maximum, le voyage peut durer seulement 131 jours). L'utilisation de trajectoires sécantes plus courtes et plus rapides augmente également la durée de la fenêtre de lancement, ce qui est un avantage certain.

Malheureusement, une vitesse élevée a deux inconvénients majeurs. Premièrement, il faut une grande quantité de carburant. Et pour transporter tout ce carburant, il faut encore plus de puissance, c'est à dire plus de carburant ! On le voit, il a y ici un beau cercle vicieux. Le deuxième inconvénient concerne le freinage à effectuer une fois à proximité de la planète. Ce n'est pas tout d'aller vite, il faut aussi pouvoir se placer en orbite autour de Mars (ou atterrir à sa surface en douceur). Qui dit insertion en orbite dit forcément ralentissement. Il faut effectivement que la sonde aille suffisamment lentement pour être capturé par le champ de gravité martien, sinon elle continue sur son orbite héliocentrique en laissant la planète derrière elle ! Plus la vitesse à l'arrivée est importante, plus le freinage doit être fort. Ce qui pose problème, car le freinage consomme une très grande quantité de carburant, et cette quantité est forcément limitée. Notez que nous parlons ici du carburant nécessaire pour la mise en orbite et non celui requis pour modifier l'orbite après l'insertion. La technique de l'aérofreinage permet d'économiser du carburant pour la modification de l'orbite, mais seulement après que la sonde se soit placée en orbite. Seule la technique de l'aérocapture pourrait présenter un avantage.

Nous l'avons vu, un vaisseau lancé depuis la Terre bénéficie de la vitesse de celle ci dans l'espace. Une vitesse qui est loin d'être négligeable, puisqu'elle avoisine les 108 000 km/h. C'est cette vitesse incroyable qui permet à la sonde de parcourir en un laps de temps raisonnable les centaines de millions de kilomètres de l'orbite de transfert de Hohmann. Cependant, la planète rouge circule aussi à grande vitesse sur son orbite, même si elle se déplace un peu moins vite que la Terre (ce qui est normal car elle est située plus loin du soleil que notre planète). Sa vitesse est de 87 000 km/h. Une sonde spatiale fonce donc vers Mars comme un bolide à une vitesse égale à la différence des deux planètes, soit environ 20 000 km/h. Pour se placer en orbite, il lui faut ralentir jusqu'à la vitesse limite de 2700 km/h, sinon elle échappera à l'influence de Mars et continuera comme si de rien n'était sur sa lancée. On le voit, le coup de frein à donner est loin d'être banal !

Trucs et astuces

L'effet de fronde : profiter de la vitesse de rotation de la Terre pour le lancement

Voici quelques petites astuces pour aller plus vite sans rien dépenser. C'est bien beau de profiter de la vitesse de la Terre dans sa course autour du soleil, mais on peut aussi profiter de sa rotation ! Comme vous le savez tous, la Terre tourne sur elle-même, mais à des vitesses différentes suivant les endroits ou l'on se trouve. Par exemple, si vous voulez partir depuis le pôle nord, vous ne pourriez pas choisir pire endroit, car la vitesse de rotation est nulle ! Le mieux (et le plus logique pour des vacances), c'est l'équateur. Effectivement un point situé à l'équateur tourne plus vite qu'un point situé à une latitude supérieure. Ainsi, rien qu'en restant sur son pas de tir, le vaisseau se déplace déjà à 1650 km/h par rapport au centre de la Terre. C'est toujours ça de gagné sur les 28 000 km/h nécessaires pour se placer en orbite basse ou les 40 000 km/h nécessaires pour échapper à l'attraction terrestre. Attention cependant : un lancement équatorial n'est requis que pour les orbites faiblement inclinées sur l'écliptique comme celles empruntées par les sondes interplanétaires, il ne présente aucun avantage pour atteindre des orbites polaires !

Comme les principaux sites de lancement sont situés à des latitudes différentes, ils n'offrent pas tous les mêmes performances. Kourou, situé à proximité de l'équateur, occupe une place privilégiée. Cap Canaveral en Floride est en deuxième position dans le classement. On trouve ensuite Baïkonour au Kazakhstan et Plesetsk en Russie. Je présente ici les sites de lancement les plus connus, libre à vous d'en choisir un autre comme Wallops aux Etats-Unis, Kagoshima au Japon, Xichang en Chine ou même la plate-forme italienne de San Marco ! Un lancement dans des conditions optimales (c'est à dire depuis l'équateur) est également possible en même temps qu'une petite croisière en mer grâce à la toute nouvelle plate-forme mobile de lancement SeaLaunch (construite à partir d'une plate-forme pétrolière).

L'assistance gravitationnelle, ou comment utiliser les autres planètes pour accélérer

Il y a également une astuce qui permet à une sonde de modifier gratuitement sa direction, son inclinaison par rapport au plan de l'écliptique et surtout sa vitesse de manière gratuite. Il s'agit de l'assistance gravitationnelle. J'y consacre ici un petit paragraphe car la petite sonde japonaise Nozomi a employé cette technique pour partir vers Mars. Pour profiter de l'assistance gravitationnelle, il faut définir la trajectoire de notre sonde de manière à ce qu'elle vienne à la rencontre d'une planète en arrivant dans son dos. Dans un premier temps, la sonde s'approche de la planète et finit par rentrer dans sa zone d'influence. Le puits gravitationnel attire de plus en plus la sonde qui voit sa vitesse augmenter. Bien entendu, la trajectoire de la sonde a été établie de manière à éviter une collision avec la planète choisie. Notre vaisseau spatial dépasse donc la planète sain et sauf et sort progressivement du puits gravitationnel de celle ci, en perdant petit à petit de la vitesse. A la fin du survol, la sonde a perdu autant de vitesse pendant la phase de sortie qu'elle n'en a gagné pendant la phase d'entrée. Vous êtes sans doute en train de vous demander la finalité de cette manœuvre qui n'a apparemment servi à rien. Pourtant la vitesse de la sonde a considérablement augmenté. Effectivement, lorsque la sonde quitte définitivement l'influence gravitationnelle de la planète à la fin du survol, sa vitesse est égale à la somme vectorielle de sa vitesse initiale et de la vitesse de la planète autour du Soleil, qui est loin d'être négligeable. Notons que cette manœuvre modifie aussi sensiblement la direction de la sonde, qui est courbée par la planète survolée.

Le choix de la fusée

Le choix du lanceur est un élément crucial pour réussir un voyage vers Mars. Il va dépendre d'un certain nombre de paramètres, comme la masse du vaisseau ou de la sonde (qui va conditionner la puissance nécessaire), le type de trajectoire désirée (économique ou rapide) et bien entendu les ressources financières disponibles. Le poids du vaisseau à lancer est un élément qui intervient de manière capitale dans le coût de la mission.

Inutile ici de déblatérer inutilement, il n'y a aucun mal à reprendre les travaux de nos prédécesseurs. Vous pourrez donc trouver de nombreux renseignements en étudiant les lanceurs qui ont réellement été utilisés pour l'exploration spatiale de la planète Mars de 1960 à nos jours et faire votre choix entre des fusées de plusieurs nationalités. Du côté Russe, le choix se limite à la vénérable R7 Molnya (plutôt vieille mais assez fiable, utilisé pour les premières sondes martiennes soviétiques) et le lanceur Proton (le top du top, ce lanceur a propulsé de nombreuses sondes soviétiques et russes mais il a connu quelquefois, comment dire, des ratés au décollage). Notons que la sonde Mars Express de l'Agence Spatiale Européenne devrait être lancée en 2003 par une fusée soviétique R7 Soyouz dotée d'un troisième étage de type Fregat.

Côté américain, il y a plus de choix : Atlas/Agena (un peu poussif, utilisé pour les premières sondes martiennes de type Mariner dont Mariner 4), Atlas/Centaur (déjà mieux, utilisé entre autre par Mariner 9), Titan III-E (le lanceur des sondes Viking et Mars Observer, attention les yeux, celui ci dépote sec !), Delta II 7925 (très à la mode depuis Pathfinder), Delta II 7425 (le dernier cri, utilisé par Mars Climate Orbiter et Mars Polar Lander). A noter l'arrivée d'une petite japonaise très sympathique, la M-5, mise en oeuvre pour la sonde Nozomi. Enfin, dans les années à venir, notre fameux lanceur Ariane 5 va aussi être disponible pour les voyages à destination de la planète rouge.

Pour en savoir plus :

Go ! Comment sélectionne-t-on un site d'atterrissage ?

Le lanceur Proton

Pour lancer une sonde vers Mars et échapper au puits gravitationnel de la Terre, il faut insuffler à l'engin une vitesse supérieure à la deuxième vitesse cosmique (11,2 km/s). Il faut donc utiliser un lanceur capable de développer suffisamment de poussée pour atteindre cette vitesse, comme la fusée Proton que l'on peut admirer ici en plein décollage et qui a contribué à l'envoi de nombreuses sondes soviétiques vers Mars. L'orbite la plus économique pour atteindre Mars, l'orbite de transfert de Hohmann, permet d'effectuer le voyage en 9 mois. Il est possible d'aller plus vite et de raccourcir la durée du voyage, mais au prix d'une dépense énergétique importante aussi bien pour l'accélération au départ que pour la décélération à l'arrivée, sans parler de l'escalade des coûts de la mission. La vitesse à laquelle une sonde peut se déplacer possède effectivement des limites. La première concerne le lanceur. Les fusées actuelles ont des capacités limitées et certaines vitesses sont absolument impossibles à atteindre avec les technologies dont nous disposons. La deuxième concerne l'énergie à dépenser pour freiner en vue de la mise en orbite ou de l'atterrissage de la sonde. Plus le freinage est important, plus le moteur de la sonde doit être puissant et plus la masse de propergols à brûler doit être élevée (ce qui augmente au final la masse de la sonde, donc la puissance du lanceur à utiliser, donc le coût de la mission). Au- delà d'une certaine vitesse, la puissance qu'il faut délivrer pour le freinage enlève tout avantage au gain de temps obtenu par le surcroît de vitesse de l'engin spatial pendant son voyage Terre - Mars (Crédit photo : International Launch Services).

Orbite de transfert de Hohmann

A cause du changement continuel de position de Mars par rapport à la Terre, les lancements ne peuvent avoir lieu que lors de certaines périodes, que l'on appelle fenêtre de tir. En ce qui concerne Mars, les lancements ne sont possibles que lorsque la planète Terre est située à 44° en arrière par rapport à Mars. Cette situation ne se présente que tous les 26 mois, à proximité des périodes d'opposition. Après le lancement, la vitesse de la sonde sur son orbite héliocentrique de transfert (Vs) est égale à la somme vectorielle de la vitesse de la Terre (Vt) et d'une partie de la vitesse que la sonde a reçu du lanceur (Vr). Pour partir vers le système solaire externe, on lance la sonde dans la direction de la Terre. Pour atteindre une planète du système solaire interne comme Vénus, c'est le contraire. En A, position respective de Mars et de la Terre au moment du lancement. En B, la position respective de Mars et de la Terre lors de l'atterrissage (Crédit photo : © Philippe Labrot).

Trajectoire de type I et II

Lorsqu'une sonde spatiale suit une trajectoire de type I, elle décrit autour du Soleil un arc de moins de 180° (schéma du haut). Au contraire, dans le cas d'une trajectoire de type II (schéma du bas), l'arc dépasse les 180° (Crédit photo : © Philippe Labrot).

Trajectoire de Mars Pathfinder

La sonde Mars Pathfinder a suivi une trajectoire de type I. Celle-ci était plutôt rapide et la sonde l'a parcouru en sept mois, le lancement ayant eu lieu le 4 décembre 1996 et l'atterrissage le 4 juillet 1997. Lancée après Mars Global Surveyor, la sonde Pathfinder est arrivée bien avant ! En A, la position respective de Mars et de la Terre au moment du lancement. En B, la position respective de Mars et de la Terre lors de l'atterrissage (Crédit photo : © Philippe Labrot).

Trajectoire de Mars Global Surveyor

La fenêtre de tir de la sonde Mars Global Surveyor s'est ouverte le 5 novembre 1997 et s'est refermée 20 jours plus tard, le 25 novembre 1997. La sonde a été lancée sans problème à l'intérieur de cette plage le 7 novembre 1996 depuis Cap Canaveral. Après un voyage de 10 mois et 750 millions de kilomètres au compteur, Mars Global Surveyor est arrivée sur Mars le 12 septembre 1997. La sonde a suivi une trajectoire de type II. Bien que partie avant Mars Pathfinder, elle s'est fait doublée en cours de route et elle est arrivée sur Mars avec un mois de retard par rapport à Pathfinder. La trajectoire suivie par Pathfinder apparaît également sur le schéma (Crédit photo : © Philippe Labrot).

Trajectoire de Mars Polar Lander

Mars Polar Lander a suivi une belle trajectoire de type II. Lancée le 3 janvier 1999, la sonde devait atterrir sur Mars le 3 décembre 1999, après un assez long voyage de 11 mois. Pendant la première partie de son voyage, Mars Polar Lander s'est porté légèrement vers le Soleil avant de recouper l'orbite terrestre et de partir vers l'extérieur en direction de Mars. A la fin du voyage, la sonde s'est déportée un peu sur le côté extérieur de l'orbite de Mars avant de se rabattre pour la couper à nouveau juste avant l'atterrissage. Ce cheminement compliqué lui a permis d'arriver au-dessus de la bonne région à la bonne date. En A, la position de la Terre au moment du lancement. En B, la position de Mars lors de l'atterrissage (Crédit photo : © Philippe Labrot).

 

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