Lorsque les ingénieurs de la
mission Viking ont découvert les premières
images d'Ares Vallis transmises par Pathfinder,
ils ont immédiatement compris qu'ils avaient fait le bon choix, 20 ans
auparavant. Avec une garde au sol de 22 cm, Viking n'aurait eu pratiquement
aucune chance sur ce site jonché de cailloux de toutes tailles. N'importe
quelle roche aurait perforé le fond de la sonde, exposant la délicate
électronique aux températures glaciales et condamnant par la même occasion
l'engin à une agonie froide et gelée.
Si Pathfinder a pu réussir là où Viking aurait échoué, c'est parce que la
sonde comportait un système d'entrée, de descente et d'atterrissage (EDL en
anglais) innovant. Alors que Viking devait freiner sous le contrôle de
rétrofusées et atterrir sur ses pieds, Pathfinder pouvait terminer son voyage
d'une façon beaucoup plus sauvage. Protégée par un douillet cocon d'airbags,
la sonde a frappé violemment la surface pour rebondir plus d'une dizaine de
fois comme un vulgaire ballon de plage avant de s'immobiliser définitivement.
Un ingénieux dispositif était capable de replacer la sonde à l'endroit, même
dans le cas où l'arrêt se serait effectué la tête en bas.
Le système, très critiqué lors de sa présentation, a parfaitement
fonctionné et la mission a connu le succès que l'on sait. Adapter
l'atterrisseur au site et non pas le contraire, voilà la clé de la réussite
sur Mars. Encore faut-il connaître parfaitement la région que l'on a estimée
digne d'intérêt.
Tout le monde admet que le site d'atterrissage de Mars
Polar Lander n'avait pas fait l'objet d'assez d'attention. La NASA est
consciente du problème et la reconnaissance de la planète à très haute
résolution pourrait d'ailleurs devenir l'un des objectifs prioritaires du
nouveau programme d'exploration martien actuellement en cours de définition.
Cette reconnaissance pourra s'effectuer de plusieurs manières. La caméra
de la sonde Mars Global Surveyor le prouve
chaque jour, nous sommes maintenant capable d'obtenir des clichés de
résolution métrique de la surface martienne. Mais aussi puissante soit-elle
(Mars Global Surveyor est capable de distinguer l'équivalent d'une grosse
voiture sur Mars, alors que Viking ne pouvait voir que des objets de la taille
d'un stade), sa résolution n'est pas suffisante pour distinguer certains
dangers, petits, mais costauds .
Un moyen original de passer les terrains à la loupe serait d'envoyer des bombes
intelligentes : un petit cône profilé aérodynamiquement dans le nez duquel on
a logé une caméra pointant vers le bas. Lors de son plongeon vers la surface
de Mars, cette bombe pacifique prendrait des images de plus en plus rapprochées
du sol, jusqu'à l'impact final. Larguées en masse et disséminées un peu
partout, ces petites sondes pourraient nous permettre d'explorer à moindre
coût et de manière efficace un grand nombre de sites potentiellement
intéressants.
Seule une reconnaissance de surface sérieuse et une réflexion sur les
techniques d'atterrissage à mettre en œuvre cas par cas nous permettra de
progresser à grand pas dans l'exploration de la planète Mars.
Pour l'atterrisseur de la mission Mars
Surveyor 2001, copie carbone de Mars Polar Lander, les américains avaient
choisi le site d'atterrissage le plus spectaculaire qui soit : le plancher du
majestueux canyon de Valles Marineris. Aujourd'hui,
dans une certaine morosité, cette mission a été repoussée de deux ans et les
scientifiques ont revu leurs ambitions à la baisse. Un site un peu plus modeste
du point de vue scientifique, mais bien moins risqué pour cette sonde en sursis
a été choisi. Pathfinder s'est posé dans Ares Vallis 20 ans après la
sélection de ce site pour la mission Viking. Espérons qu'il n'en sera pas de
même pour le canyon de Valles Marineris...
Cet article a été publié
pour la première fois sur le site Geoman.Net.
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